Les femmes dans
l’Église,
et plus
particulièrement dans sa gouvernance
Réflexions échangées
le 8 mars 2012
au marché de Lerme puis au centre Beaulieu
entre les 44 + 63 participant-e-s aux rencontres
(dont 9 + 11 habitué-e-s de « Dialogue et Liberté »)
Remarque préliminaire
Avec les images et les commentaires
du diaporama, les participants redisent :
« La résurrection a été
signifiée d’abord à une femme.
La mère de Jésus est une femme.
Des femmes dans l’Évangile font des
professions de foi tout aussi importantes que celle de Pierre. Les femmes sont présentes
auprès de Jésus et l’Évangile en parle. »
Les femmes présentes, en après-midi
comme en soirée, ont partagé un moment de complicité en se retrouvant dans les termes
« ménage », « caritatif », « éducation »,
« pastorale » du diaporama !
Des constats
"Le groupe Seve
( groupe œcuménique qui comporte sur Bordeaux 10 équipes de 8 personnes ) a été
fondé par une femme.
Il y a une
femme au Conseil Épiscopal de l’évêque de Bordeaux et 190 femmes en
responsabilité reconnue ; en fait beaucoup plus, car beaucoup de femmes
n'ont pas de lettre de mission.
Il y a une
évolution importante dans la place que les femmes ont prises dans la
célébration des funérailles : elles y font le commentaire d’Evangile et engagent
la Parole de l’Eglise. Elles le font à
leur manière, différente de celle des hommes
et des hommes/prêtres Elles engagent la parole de l’Église avec leur
féminité. Il faudrait que les femmes ne soient pas missionnées seulement pour
les obsèques !
Évolution au
Grand Séminaire : il y a des professeures et intervenantes femmes
et des
femmes viennent parler aux séminaristes de leurs rôles dans les paroisses.Le diocèse est aussi l'affaire des femmes, mais « ils » sont réticents.
Anecdote :
à l’hôpital quand des patients arrivent dans la salle d’opération, ils
demandent « où est le médecin ? » pensant que les femmes présentes ne
sont que des infirmières !
Ce qui se
passe dans l’Eglise est le reflet -aggravé-
de ce qui se passe dans la vie quotidienne : les femmes étaient
considérées comme des mineures puis
elles devaient élever leurs enfants et n'avaient pas le temps de faire autre
chose.
Quand une
femme veut que quelque chose se passe, elle y arrive.
Dans les
responsabilités, si on est femme, il faut beaucoup plus de qualités.
Dans les
assemblées, ce sont les hommes qui parlent les premiers et à qui on donne, de
préférence, la parole.
Dans
n'importe quel groupe social, il n'y a que la moitié des personnes qui
gouverne ! dans l’Église, il n'y a que 20% d'hommes et ils gouvernent !
Au Concile
Vatican 2, des femmes ont été invitées... mais pas de droit de vote ! Au
Sénat, à l’Assemblée Nationale ou à l’Elysée… il y a bien peu de femmes !
Toutes les
décisions reviennent aux prêtres, donc à des hommes.
Les femmes
font peur aux prêtres !
En voulant
parler des femmes, on parle des laïcs !
Il y a
confusion entre sacerdoce et tout ce qui est autorité, gouvernance, prise de décisions.
Dans d'autres Eglises chrétiennes, les textes sont lus autrement que dans l’Eglise romaine.
Il n'y a pas
de femme diacre, pas de femme prêtre dans l’Église catholique, mais il y a des
femmes pasteurs, il ya des femmes évêques dans des églises chrétiennes.
Seuls les
clercs ont pouvoir de décision dans l’Église, donc les hommes seuls décident !
Le fait n’est pas, en soi, source de droit ! L’histoire
montre les drames qui en découlent. Ce n’est pas parce que depuis des siècles
on a refusé leur place aux femmes que
cela justifie qu’on continue la discrimination.
Aujourd’hui le mode de fonctionnement dans l’Eglise
pose la question du sens de cette discrimination homme/femme ."
Des souffrances, des regrets
"Une anecdote
relatée par une femme qui préside des obsèques : première remarque :
« où est le prêtre ? » suivi de : « et en plus c'est
une femme ! » Ca en dit long
sur les mentalités !
Il y a eu
régression depuis les tout premiers siècles. Aux tout premiers siècles les
femmes chrétiennes, et c’était étonnant pour les autres religions, tenaient une
place importante dans la communauté.
Il y a eu
une évolution pendant les 30 dernières années, mais c'est trop long !
Il n'y aura
pas de femme pour l'élection du futur Pape. Pourquoi des femmes de valeur,
excellentes biblistes, moralistes, théologiennes… n’ont-elles pas leur mot à
dire par exemple dans l’élection du
pape ? Pourquoi pas des femmes
cardinales électrices du pape ? malgré la décision de Jean-Paul 2
Nos évêques
parlent, disent ce qu'ils pensent, une fois qu'ils sont à la retraite !
Tous les
combats ne réussissent pas ; dans l’Église, il peut y avoir des lieux où
ça régresse.
Dans
certaines paroisses, « on » refuse que les femmes distribuent la
communion, pénètrent dans le chœur (sauf, probablement, pour faire le ménage !)
Certaines
images « caricaturalement pieuses » données par des photos exposées
dans le cloître du Grand Séminaire et par une émission de KTO ne mettent pas en valeur la richesse de l’altérité
Hommes-Femmes
La
« lettre de mission » permet d'exister aux yeux des autres, mais il
y a peu de soutien de l’Église institution ; des personnes se sentent
abandonnées ; ceux « du haut » n'attendent rien du
« bas » ; les prêtres se retrouvent pour des retraites et
ceux envoyés en mission ?"
Les enjeux de la
mixité dans l’Eglise
"La
justice, ce n’est pas une option ni dans la cité ni dans l’Eglise. C’est la justice qui nous fait reconnaître la
dignité de la femme et de l’homme.
Avoir
deux poids deux mesures, c’est injuste pour les femmes et c’est indigne de l’Eglise.
Nous refuserions de participer à des associations qui font une discrimination
entre les noirs et les blancs … l’Eglise fait bien une discrimination similaire
en interdisant aux femmes, parce qu’elles sont femmes, ce qu’elle réserve aux
hommes.
Ne
pas reconnaître aux femmes une égale dignité, et cela jusque dans la
gouvernance, c’est une trahison de l’Evangile ! L’Eglise va-t-elle donner
le signe que femmes et hommes sont reconnues avec une égale dignité ?
Pourquoi
l’Eglise n’aurait-elle pas à respecter les lois de la cité, par exemple celles de la
parité ?
Dieu n’est ni masculin ni féminin, il est
« homme et femme »
Créateurs à
l'image de Dieu, homme et femme sont co-responsables.
Il n'y a pas
d'humanité s'il n'y a que des hommes ou que des femmes.
L'homme et
la femme sont différents et les deux sont importants. C’est important de ne pas
gommer ce qui est altérité pour ne pas tomber dans la confusion. Mais attention
à ne pas se laisser piéger par la soi-disant complémentarité homme/femme qui conduit toujours à laisser aux femmes des
tâches considérées comme subalternes par les hommes !
L’altérité
homme/femme est essentielle : elle est à l’image de Dieu ! mais elle n’induit pas la manière de prendre
des responsabilités dans la société !
Tant que la
place de la femme n'aura pas avancé dans la société civile, ce sera difficile
dans l’Église !
Le signe
qu'on est vraiment libres doit être donné par l’Église : égalité entre
hommes et femmes, entre les races...
Du fait de
sa vocation prophétique, l’Eglise doit annoncer par la proclamation de la
Parole et par des actes en cohérence avec ces textes :« il
n'y a plus ni hommes ni femmes, ni esclaves ni hommes libres... »
C'est tout à
fait différent d'un enjeu de pouvoir. Il faut dissocier sacerdoce et postes à
responsabilités.
...et si
c'était l’Église qui devait donner l'exemple ! Si elle devait rendre ce
service à la société : inventer un mode d’être ensemble, différents et
co-responsables
Pourquoi
l’Église ne donnerait pas le « tempo » ?
L’Eglise a pour mission l’annonce de la Parole , si
elle n’est pas crédible à cause de ce qu’elle donne à voir, sa parole n’est pas
recevable !
Jésus est le
prophète du Royaume où tous sont libres,
où tous sont également reconnus, où tous ont une même dignité.
Dans l’entourage
de Jésus ; il y avait des femmes et des hommes
Ne pas confondre le symbolisme et le réalisme en
interprétant « in personna Christi ». Ce n’est pas parce que l’on
célèbre les sacrements au nom du Christ , que seuls des mâles peuvent le faire !
C’est comme si la tendresse de Dieu ne pouvait pas s’exprimer par des femmes
parce que le Christ qui a manifesté cette tendresse à l’humanité était un mâle !
Des femmes
ont des responsabilités dans l’Église, mais dans l’Église locale, pas à la tête, pas à Rome !
Mais l’Eglise
c’est nous !......"
Des initiatives à
prendre, des attitudes à transformer
"Comment vont
faire les femmes dans l’Église de
Gironde pour prendre leur place jusque dans la gouvernance ?
Agir, protester contre l’exclusion des femmes, même
quand cela paraît sans importance. Bagarrer quand des avancées sont refusées
Les
femmes peuvent accepter les
responsabilités, prendre toute leur place dans tous les domaines. Il est
important que les femmes ne se cantonnent pas elles-mêmes dans des rôles
subalternes !
Les femmes ont le courage de
prendre la parole, de faire le
premier pas et de ne pas laisser les hommes prendre tous les pouvoirs.
Elles ont besoin d’aller plus loin en ce sens, d’acquérir des compétences et de
se faire confiance.
Ne
jamais oublier la priorité de la mission
Les
femmes doivent se rappeler, comme les hommes laïcs, que tous les laïcs ont une
ardente obligation de parler !
Pour
tenir sa place, s’exprimer, prendre la parole même devant des hommes clercs qui, eux,
se sont formés, il
faut se former, construire sa pensée. Se forger des
convictions cela suppose de réfléchir à plusieurs, de partager une
réflexion fondée sur la rationalité et
éclairée par la lecture de la Parole.
Les laïcs et
notamment les femmes, peuvent s'entraider pour avoir la force de prendre la
parole, pour élaborer leur pensée et pouvoir l’exprimer publiquement
Pour faire avancer la place de la femme dans l’Eglise, il faut faire avancer la place de la femme dans la société. Et c’est bien dans la mission de l’Eglise que d’humaniser notre monde !
Il
nous faut travailler sur les représentations qui courent et souvent reproduisent
des schémas du 19 ° s ! Souvent nous-mêmes nous les véhiculons ces schémas
discriminants et non évangéliques.
Veiller à ce que des hommes et des femmes fassent
les lectures et distribuent la communion
Agir pour une égale dignité des femmes et des
hommes, par ex quand une femme assure le commentaire d’Evangile elle accède à
la même dignitéObtenir que des femmes (et aussi des laïcs hommes) fassent des homélies pendant les célébrations
Veiller à ce que les paroisses invitent des petites filles à être enfants de chœur. Refuser l’exclusion des femmes du chœur de l’Eglise ! Faire la grève des balais et des fleurs !
Comment
les femmes en responsabilité
interpellent-elles les responsables : doyens, évêques… pour que les
femmes prennent davantage leurs responsabilités de baptisées ?
Dissocier,
chaque fois que c’est possible, le ministère presbytéral lié à l’ordination, de
la responsabilité institutionnelle.
Il y a un
verrou théologique ( ?) à travailler : pas de possibilité de
responsabilité si pas de sacerdoce ; un prêtre ne peut pas obéir à un laïc !
Il
faudrait former les séminaristes et leur permettre de comprendre sans effroi
les responsabilités que les femmes se doivent de prendre comme baptisées
Accepter
des échecs et ne pas s’offusquer d’être parfois moquée ou rejetée.
Refuser les régressions
Quand
les pratiques des clercs vont vers la
régression, il faut rester en lien avec
les communautés qui vont vers plus de
responsabilité partagée, pour garder vive l’espérance. Et puis quand on a tout
essayé pour faire changer sa paroisse,
on va vers une autre paroisse ; si les quêtes baissent trop, le curé
finira par se poser des questions !
Il est important
de ne pas perdre espoir, de se serrer les coudes quand on est dans des
paroisses où tout régresse.
Et ... ne pas se laisser piéger par la revendication du
pouvoir !"
Ces notes n'ont pas prétention à l'exhaustivité !
elles n’ont d’autre prétention que de donner un écho
d’échanges nombreux, réfléchis, critiques et constructifs…
Merci à celles et à ceux qui ont accepté de prendre
la parole
ce 8 mars 2012,
au risque que leur parole ne soit pas fidèlement
retransmise.